Depuis la destitution et l’arrestation de l’ancien président péruvien Pedro Castillo, le 7 décembre 2022, une crise politique frappe le pays. Les manifestations se multiplient dans le pays.
Un partisan de l'ancien président péruvien Pedro Castillo porte un masque pour se protéger des gaz lacrymogènes lors d'une manifestation près du Congrès à Lima (Pérou), le 12 décembre 2022. (ERNESTO BENAVIDES / AFP)
Les 418 touristes, bloqués sur le site touristique du Machu Picchu, ont été évacués ce matin. Les voies ferroviaires endommagées par des manifestants ont empêché, pendant plusieurs jours, les touristes à quitter le Machu Picchu. Des dommages collatéraux des tensions qui ébranlent le Pérou depuis début décembre.
1. Quel a été l'événement déclencheur ?
Les protestations ont éclaté après la destitution pour “incapacité morale” et l’arrestation, le mercredi 7 décembre 2022, de l’ancien président Pedro Castillo. Élu, le 28 juillet 2021, avec un programme anti-système, cet instituteur de 53 ans sans expérience politique était sur la sellette depuis quelques mois. Un mandat court mais marqué par des scandales de corruption. Six enquêtes ont été ouvertes, et il existait un conflit permanent avec le Congrès. En effet, plusieurs motions de destitution ont été lancées sans pour autant aboutir. La troisième lui fut fatale.
Il est accusé d’avoir tenté de perpétrer un coup d’Etat en dissolvant le Congrès et en établissant un gouvernement d'urgence exceptionnel. Il justifiait ses choix en disant vouloir “rétablir l’Etat de droit et la démocratie”. Pour la vice-présidente, Dina Boluarte, et d'autres personnalités politiques, c’est une tentative de "coup d'État". Sa destitution a été approuvée par 101 des 130 parlementaires, dont 80 dans l’opposition.
La vice-présidente, Dina Boluarte, a prêté serment mercredi 7 décembre prenant la gouvernance du pays. Elle a convoqué “une trêve politique afin d’installer un gouvernement d’union nationale”.
2. Quelles sont les revendications des militants ?
Suite à l’investiture de Dina Boluarte, des manifestations ont éclaté dans tout le pays, notamment dans les régions andines très favorables à l’ex-président, Pedro Castillo. Dina Boluarte, membre du même parti que Pedro Castillo, “Pérou Libre”, est vue comme une “traîtresse” par les manifestants qui réclament sa démission ainsi que des élections immédiates. Cependant, la constitution prévoit la tenue des élections présidentielles tous les cinq ans – donc, en 2026. "Une réforme constitutionnelle est obligatoire parce que la règle est de respecter les délais d'un mandat de cinq ans inscrits dans la Constitution pour le président et le Congrès", explique à l'AFP le juriste Roberto Pereira.
La présidente avait annoncé, quelques jours après son élection, pour essayer d’apaiser les tensions dans le pays, avancer les élections générales à avril 2024. Elle laisse ainsi le temps à son gouvernement de réaliser les réformes constitutionnelles nécessaires. Cependant, les tensions n’ont pas diminué puisque depuis le 19 janvier, des milliers de manifestants, provenant en majorité des zones du sud du pays, convergent, malgré l’état d’urgence mis en place dans plusieurs régions, vers Lima, la capitale du Pérou.
Le 12 décembre, encore incarcéré, l’ancien président soutient les manifestations en publiant, sur son Twitter, une lettre manuscrite dans laquelle il traite Dina Boluarte d’"usurpatrice qui représente ces morveux et [ces] idiots de la droite putschiste”. Il a également déclaré lors d’une audience, pour demander sa remise en liberté, qu'il "ne renoncera jamais et n'abandonnera pas [la] cause qui [l]'a amené ici". Avant d'ajouter : "Je suis détenu de manière injuste et arbitraire, je ne suis ni un voleur, ni un violeur, ni un corrompu ou un voyou".
3. Quelles sont les conséquences de cette prise politique ?
Depuis le début des manifestations, au moins 45 personnes (44 civils et 1 policier) sont mortes face à la répression policière. L'Union européenne a condamné samedi 14 janvier les violences « disproportionnées » de la police contre les manifestants. L'UE « déplore le très grand nombre de victimes depuis le début des manifestations », a déclaré un porte-parole des Vingt-Sept. Des dégâts matériaux sont aussi à déplorer, un bâtiment historique dans le centre de Lima a pris feu jeudi 19 janvier.
Face aux manifestations, le gouvernement de Dina Boluarte a mis en place un état d’urgence. Les militaires peuvent ainsi intervenir aux côtés de la police pour rétablir l'ordre public. Dimanche 15 janvier, il a été étendu pour 30 jours à Lima, Cusco, Callao et Puno. Jeudi 19 janvier, les régions septentrionales d'Amazonas et La Libertad et celle de Tacna, dans le sud, ont été incluses dans l'état d'urgence, environ un tiers du pays se trouve sous ce régime, jusqu'à la mi-février.
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